Florence Andoka:Gwendoline Robin
Florence Andoka écrit après la performance de Gwendoline Robin jeudi 19.03.2015 lors de «Fabrika Voxa 2015», un événement coproduit par Montagne Froide et l’Espace Multimédia Gantner à Bourogne, Département du Territoire de Belfort.
La limite, voire même le seuil, hante la performance de Gwendoline Robin. La voix humaine se fait silence, des gestes laissant entendre le bruit des matériaux convoqués. L’action se déroule de nuit, dans les espaces extérieurs du bâtiment de Bourgogne. Les corps des observateurs s’agrégent ça et là. L’artiste exécute une chorégraphie, où elle manipule du verre, de la terre, du feu. Chaque élément est mis en tension, émet sa propre musique. Un disque de verre lancé par l’artiste roule et se brise dans le fracas. Des tiges de verres sont frottées contre le sol, un chant strident accompagne la perte du matériau. Une explosion retentit au centre d’un monceau de terre. Gwendoline Robin anime une couverture d’aluminium tel un dragon chinois aux formes simplifiées. La matière est sans cesse mise à mal, se métamorphose, change d’état. L’artiste en magicienne d’un étrange rituel flirte avec le danger, laisse courir une mèche en feu au coeur d’une tige de verre qu’elle approche de son œil. L’enchaînement des gestes sans parole de Gwendoline Robin esquisse un passage ténu entre physique et métaphysique. La performance ne peut reposer que sur une maîtrise aiguë de la mise en scène des matériaux, de leurs limites, des sons qui jailliront de leurs destructions. Pourtant de cette virtuosité, de cette aisance chorégraphique exulte une dimension mystérieuse et mystique. On éprouve la charge symbolique des évènements, tout le corps est attentif, presque recueilli face à l’artiste agissant. On touche alors à l’un des problèmes majeurs qui agite le champ de la performance depuis ses débuts. La performance s’est construite à distance de la danse et du théâtre. Cette distinction est ténue mais importante et se concentre autour de la notion de représentation. Comment la performance, alors qu’elle présente une action, n’est pas une représentation, ni un spectacle ? Gwendoline Robin dans cette performance esquisse une réponse possible, parce qu’elle rompt avec toute perspective mimétique par rapport à la réalité, mais aussi parce qu’elle agit avec ceux qui sont présents, et entre avec eux dans une sorte de danse mystérieuse comme une maîtresse de cérémonie qui tisse des liens invisibles entre les corps.
Par Florence Andoka (diplômée en philosophie et critique d’art)
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